Sommaire
60 000 victimes homosexuelles en France
On estime que cela concerne environ 60 000 homosexuels condamnés entre 1942 et 1982. Il est également important pour le Sénat français de reconnaître le rôle tristement célèbre de la France dans la persécution des homosexuels en Europe. Comme en Allemagne, les homosexuels en France ont continué à être persécutés et emprisonnés même après la fin de la guerre. Le pays a effectivement dépénalisé l’homosexualité pour la première fois en 1789, pendant la révolution, mais a ensuite réintroduit des sanctions.
Les indemnisations proposées se concentrent sur une période de 40 ans, à partir de 1942. La législation de l’époque prévoyait notamment des âges de consentement différents et discriminatoires : pour les homosexuels, celui-ci était de 21 ans. Ce n’est qu’en 1982 que les lois d’interdiction furent finalement abolies. Environ 10 000 homosexuels, pour la plupart issus de la classe ouvrière, ont été touchés – 90 pour cent d’entre eux ont été condamnés à la prison.
50 000 autres homosexuels ont été condamnés en vertu d’une deuxième loi qui condamnait les « obscénités publiques » et prévoyait une circonstance aggravante spécifiquement pour les homosexuels, ce qui leur a valu une peine deux fois plus élevée.
Le passé peu glorieux de la France
L’expert Régis Schlagdenhauffen de l’École française des sciences sociales de Paris (EHESS) a déclaré à France24 : « La France n’a pas été le berceau des droits de l’homme auquel on aime penser. La révolution a tenté de décriminaliser l’homosexualité, mais les régimes ultérieurs ont trouvé d’autres stratégies pour réprimer les homosexuels. Cette oppression a été inscrite dans la loi en 1942 et plus encore en 1960. Les gens ont tendance à penser que la France a protégé les homosexuels par rapport à l’Allemagne ou au Royaume-Uni. Mais quand on regarde les chiffres, une image complètement différente apparaît.»
Le sociologue et auteur Antoine Idier a déclaré au journal Le Monde qu’il ne faut pas oublier la persécution des homosexuels dans le passé : « La répression étatique de l’homosexualité remonte bien avant 1942. Au XIXe siècle, il y avait des persécutions extrajudiciaires contre les homosexuels par la police, une routine quotidienne de ridicule, d’humiliation, de contrôle et de harcèlement. » Il a également évoqué l’utilisation abusive des accusations d’« indécence publique » qui avaient déjà eu lieu en 1810 sous Napoléon. introduit et utilisé pour persécuter les homosexuels dans le secteur privé.
Indemnité forfaitaire de 10 000 euros
Le Sénat français prévoit d’accorder une somme forfaitaire de 10 000 euros à tous les homosexuels victimes de lois homophobes. Par ailleurs, une indemnisation de 150 euros par jour de prison et le remboursement des amendes sont prévus. Les membres du Sénat ont également exprimé leur regret d’agir si tard : à bien des égards, l’indemnisation reste une valeur symbolique, la plupart des victimes concernées étant déjà décédées.
Cependant, Schlagdenhauffen souligne en outre : « Reconnaître et réparer les injustices historiques constitue un élément important de la position d’un pays en matière de protection des droits LGBT. Si elle est adoptée, cette loi permettra à la France de mieux se conformer aux normes européennes.»
Rémunération pas encore certaine
Cependant, l’adoption de la loi est encore loin d’être certaine, a prévenu Schlagdenhauffen en faisant référence à la composition du Sénat. La chambre haute du Parlement français est dominée par le parti conservateur Les Républicains, dont les membres ont massivement rejeté le mariage homosexuel il y a à peine dix ans.